« LE PLEURE-MISERE »
Les
chaussures de Bonaparte
Adaptation
théâtrale de l’œuvre de Flann o’Brien pour un acteur
( pour tout public à partir de 10 ans)
L’AUTEUR
Brian
O'Nolan
alias
Myles na gCopalleen
alias
Flann O'Brien
(1911
– 1966)
Son
compatriote James Joyce parlait de lui comme " un écrivain
authentique doué DU véritable esprit comique ". L'hommage
sincère de cette icône de la littérature mondiale à Flann O'Brien
n'a pas empêché ce dernier de ressusciter Joyce sous les traits
d'un barman désireux de devenir pasteur dans " L'archiviste de
Dublin ".
Toute
sa vie, O'Brien s'attache au devoir d'irrévérence de tout artiste
responsable. Polémiste et pamphlétaire redouté de l'Irish Times
pendant 25 ans, il secoue la classe politique et intellectuelle de
son pays : L'Irlande. Sous sa plume inventive et burlesque, ce pays
gorgé d'eau et d'autres liquides plus distrayants prend une
dimension surréaliste. Dans son roman " Le Troisième Policier
", il développe la séduisante théorie selon laquelle
l'Irlandais et son vélo subissent un échange moléculaire qui agit
grandement sur leurs facultés respectives. Lire O'Brien, c'est
plonger dans la cinglerie d'une Irlande qu'on soupçonne mais qui
dépasse le visible.
Linguiste
émérite, secrétaire privé de plusieurs ministres, cet homme a son
pays dans la peau et dans la tête. Aussi ne se prive-t-il pas de
fondre sur ceux qui en font une terre de mission et parmi eux les
celtomanes qui transforment ses compatriotes en sujets d'études et
folklorisent jusqu'à l'indécence leurs existences rudes et
précaires dans un pays qui n'était pas encore le Tigre Celtique que
l'on connaît maintenant.
LE
ROMAN
"
An Béal Bocht, no an Milléanach "
«
Le Pleure-misère ou la triste histoire d'une vie de chien »
« An
Béal Bocht »,
la
Pauvre Bouche.
Faire
la pauvre bouche en gaélique, c'est pleurer misère pour apitoyer le
monde, surtout ses créanciers éventuels.
« Le
Pleure-Misère »
écrit en 1941 tient du pastiche et de la satire. Pastiche par la
forme qu'il emprunte à des ouvrages de référence dont " Peig
" qui est l'autobiographie d'une femme des Îles Blasket, très
renommée à l'époque en sa qualité de conteuse et de témoin
privilégiée de l'Irlande d'exil. Il n'est pas question pour lui de
railler l'expression de cette femme, encore moins les sentiments
qu'elle exprime. La satire concerne surtout une certaine élite
intellectuelle, " les gaélisants ", qui apparaissent dans
ce roman comme des vampires dénués de compassion et de
compréhension envers ces populations sinistrées socialement et
qu'il faudrait, tels des vestiges antiques, conserver en l'état pour
le bien de la science. O'Brien écrivit ce roman en gaélique, langue
qu'il maîtrisait à merveille, preuve s'il le fallait, qu'il savait
de quoi il parlait et à qui il s'adressait.
Les
traducteurs, André Verrier et Alain le Berre, ont su préserver la
verve d'o'Brien et adapter au français la musique du gaélique, en
s'aidant sans doute un peu du breton, sa langue cousine.
L’HISTOIRE
Bonaparte
O’Coonassa, de Corca Dorcha, fils de Michelangelo, fils de Peter,
fils d’Owen, fils de Sarah, fille de Thomas, fils de Mary, fille de
John, fils de James, fils de Dermot… est le héros de cette épopée
irlandaise. Bonaparte devra subir toutes sortes d’épreuves et
d’avanies sans que sa candeur, qui est grande, ne le protège. Il
faut dire qu’il porte sur les épaules toute la misère que les
pauvres Gaëls ont accumulée depuis la nuit des temps. « Il
est sûr que jamais on ne verra en Irlande de types comme nous, ni
une vie comparable à celle qui fut la nôtre et qui n’existe déjà
plus ».
Ecrite
à l’origine en gaélique, cette histoire est aussi une hilarante
et féroce charge à l’encontre des intellectuels gaélisants de
l’est à la recherche du gaélique le plus pur qu’il soit et
qu’ils trouveront chez les Gaëls de l’ouest, purs miséreux
parmi les miséreux, où « le gaélique est le seul mode
d’expression et le seul moyen de protection contre les difficultés
de la vie. ».
Quand
Bonaparte retrouvera son père, sur le quai d’une gare, ils auront
juste le temps de se reconnaître et de se dire adieu, ultime et
dernière épreuve gaélique de cette gaélique vie de chien.
L’ADAPTATION
L'action
se déroule sur un quai du port de Queenstown qu'on appelle
maintenant Cork. Ce port a vu des millions d'Irlandais embarquer sur
des bateaux à destination de l'Amérique, chargés de toutes leurs
espérances et de leur désespoirs. C'est cet endroit, encombré de
tonneaux, de filins et de chaînes, que Bonaparte a choisi pour nous
raconter son histoire avant le grand transbordement. Nous avons
décidé de le faire sortir de prison et de le faire partir vers une
autre aventure. Date de départ : le 12 avril 1912, billet de
troisième classe, sur le plus célèbre bateau de la White Star
Line, « Le plus beau vapeur au monde », le Titanic.
Bonaparte
O’Coonassa ! Avec un nom pareil, le héros de cette épopée
pourrait être en droit d’espérer voir un jour briller son soleil
à la face du monde. Malheureusement pour lui, son monde est un pays
aux pieds perpétuellement mouillés où le soleil lui même peine à
sécher ces rayons. Cette gaélique vie de chien, Bonaparte en est
l’acteur et le témoin. Pathétique, féroce, humide en permanence,
affamé de naissance, trésor national d’une Irlande en péril.
Flann
O’Brien a donné à son personnage les attributs du Celte idéal :
pauvre, illettré, soumis et parlant un langue impossible. Mais si
jamais le Celte a une âme, on la trouvera dessinée finement
derrière la satire : cette compromission de l’ordinaire avec
l’extraordinaire, ce permanent déchirement entre la révolte et la
résignation et cette joie bruyante qu’engendre la mélancolie.